La musculation n’est pas exclusivement afro-américaine ou ouest-africaine

Article : La musculation n’est pas exclusivement afro-américaine ou ouest-africaine
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24 juin 2023

La musculation n’est pas exclusivement afro-américaine ou ouest-africaine

Une première au pays des Sao (hommes de grande taille) ! Du 13 au 14 juin 2023, Moursal, le quartier le plus explosif de N’Djaména dans le 6ème Arrondissement, a accueilli de jeunes gaillards et volumineux aux silhouettes imposantes et monstrueuses, venus des quatre coins de la capitale.

Le trentenaire Djasrangar Malachie, après avoir observé, identifié et sélectionné ces « catcheurs » aux puissants et intimidants pectoraux à travers les quelques rares salles de sport de la capitale Ndjam, a eu l’idée de les confronter. Ainsi, avec l’appui du Ministère de la Jeunesse et du Sport et de quelques particuliers, ce qui n’était au départ qu’un rêve prit une forme réelle, se matérialisa et fut baptisé « festival de culturisme« . Le centre culturel Talino Manu a eu l’honneur d’abriter la toute première compétition nationale des culturistes du Tchad !

La présentation des athlètes culturistes au public. Crédit : Veïvra I. D. Noël

Le culturisme, qu’est-ce que c’est ?

Sous une fine pluie, dans une atmosphère joviale, hilarante, mouvementée, cadencée et séquencée par de notes musicales afro-américaines, un animateur fait le show. Pour ouvrir le bal, l’un des coachs et membre du comité d’organisation de la toute première édition de la « compétition de musculation » au pays de Toumai a bien voulu planter le décor en élucidant aux nombreux spectateurs ce que c’est que le culturisme.

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« Comme tout autre sport, le culturisme est une activité physique qui exige beaucoup de normes. Son but est le développement de tous les muscles du corps. Ces jeunes compétiteurs qui sont présentement en face de vous et qui, certainement, vous impressionnent par leur physique n’ont pas hérité cette forme de leurs géniteurs ou ancêtres. Ils ont délibérément accepté de soumettre leurs masses corporelles aux intenses exercices physiques et à un régime alimentaire très spécial pendant plusieurs années. Cette discipline sportive à deux catégories liées au sexe. Il y a le culturisme « masculin » et le culturisme « féminin ». Donc, mesdames, mesdemoiselles, vous êtes vivement invitées à vous joindre aux groupes de ces jeunes aux dimensions hors normes. La musculation bien qu’elle ne soit pas assez répandue au Dar Toumaï (Tchad), elle n’est pas réservée au sexe dit fort. Que les filles ne se sentent pas exclues de cette discipline dont le premier rôle est de bâtir le corps tout entier. », laisse entendre l’entraîneur acclamé par un public bouillonnant et surexcité. Le D.J, comme pour signaler sa présence momentanément ignorée, laisse échapper un son aigu mais divertissant de ses puissants émetteurs. « La catégorie masculine – celle disputée par une vingtaine de jeunes pour cette première édition – a trois autres subdivisions : le physique masculin (qui s’intéresse uniquement à la partie supérieure du corps), le physique classique (présentation de toutes les parties du corps, excepté le postérieur) et le body fitness (qui englobe les deux précédentes subdivisions : toutes les parties du corps sont exhibées) », enchaîne-t-il. « Enfin, retenez que le culturisme est le moyen le plus efficace de « brûler » les masses de graisse qui vous gênent. L’obésité disparaît et fait place aux muscles stridents, saillants et luisants« , conclut l’un des managers et préparateurs physiques de ces athlètes aux épaules larges et éléphantesques.

Une démonstration de la présentation double biceps. Crédit : Veïvra I. D. Noël

Les différentes épreuves de la compétition

Après le mot d’ouverture et de bienvenue du promoteur Djasrangar Malachie et les lumineuses explications données par l’un des managers, place aux différentes épreuves de compétition. Elles sont, entre autres, la présentation du corps (les biceps, les pectoraux, les obliques et la jambe), la traction, le développé – couché, le soulevé de terre (masses de fer), le squat, le bras de fer, etc. Sous une pluie d’acclamations, le public très dense félicite les victorieux et encourage les vaincus. Certaines disciplines étaient très disputées au point qu’il a fallu à l’arbitre et aux membres de jury de reporter le challenge au lendemain (dernier jour). Même là, plusieurs « extra-times » ont été accordés afin de départager les acteurs titanesques confrontés !

Épreuve de traction des muscles. Crédit : Veïvra Noël
Développé – Couché Haltère. Crédit : Veïvra Noël

La remise des médailles

La période de la moisson est arrivée ! Faute de moyens financiers colossaux, seuls les finalistes (c’est-à-dire les deux premiers de chaque épreuve) sont primés. Sous des applaudissements, les médailles des heureux gagnants ont été remises par le Directeur général du Ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Promotion de l’Entrepreneuriat, représentant le Ministre dudit département. Les vice-champions, quant à eux, ont reçu leurs sésames (récompenses) des mains du président de jury de ce tout premier événement au pays de Toumaï. Les organisateurs, les membres du comité d’accueil, sans oublier le directeur du centre culturel Talino Manu, ont également reçu individuellement une médaille.

Les médaillés de la première édition de culturisme au Tchad. Crédit : Veïvra I. D. Noël
Un public attentif. Crédit photo : Veïvra I. D. Noël

Le mot de clôture

Monsieur Lwanga Kaldé Dingamnaïel, le Directeur général du Ministère de la Jeunesse, un homme fort, costaud, large et grand prit la parole à l’improviste et dit : « Je dois sincèrement l’avouer devant le public que j’ai été formé, pétri et façonné par le jeune Djasrangar Malachie, promoteur de cette compétition historique pour le Tchad. D’ailleurs, je ne suis pas le seul. Je prends la parole au nom des membres du jury dont beaucoup ont été aussi formés au centre de sport de Malachie. Au nom de ce groupe, je remercie infiniment ce jeune garçon audacieux et engagé dans cette discipline très peu connue et très peu pratiquée au pays de Toumaï, berceau de l’humanité. J’exhorte le public qui m’écoute en ce moment à embrasser cette activité sportive. En vérité, le culturisme n’a pas de limite d’âge. Que vous soyez enfants, adolescents, jeunes ou vieux, vous pouvez vous exercer au culturisme. Pour cela, je vous demanderais de laisser les « jahla », les « cales », le « nguerek » et toutes sortes de boissons locales, frélatées ou importées, les mararas (viandes et boyaux), les stupéfiants, etc. Merci au chaleureux et bouillonnant public et s’il plaît à Dieu à nous revoir à la prochaine édition ». Comme pour signifier au Directeur qu’il a bien reçu le message, le public l’ovationne par un vacarme d’applaudissements.

Le promoteur, de son côté, n’a pas caché sa vive émotion : « Après dix ans de création d’un gymnase et de coaching en musculation, j’ai bien voulu rassembler autant de jeunes de différents horizons, différentes cultures, différentes confessions, … En une compétition à l’échelle nationale. Je rends grâce à Dieu pour la réalisation de l’un de mes rêves. Je remercie vivement le Ministère de la Jeunesse et des Sports et de la Promotion de l’Entrepreneuriat, les médias privés et publics et tous ceux qui n’ont ménagé aucun effort pour nous soutenir et encourager sous plusieurs aspects. Cependant, les défis à relever sont encore énormes et nous sollicitons toujours les aides aux différentes institutions nationales ou internationales. Au public et surtout aux jeunes, filles et garçons, j’aimerais vous dire que le sport d’une manière générale est le médicament le plus efficace contre les maladies telles que les tensions artérielles, le goûte, etc. Le culturisme peu importe votre sexe ou âge, vous donne une santé de fer et un mental en acier. Le développement des muscles enjolive votre silhouette. Enfin, je demanderais à l’Etat tchadien à travers le Ministère de la Jeunesse et des Sports de placer les activités sportives au cœur de ses projets. Une jeunesse qui ne pratique pas le sport est une jeunesse « cadavérique ». Or, un adage africain dit que la jeunesse est le bâton de la vieillesse. Donc, si la jeunesse meurt, qui peut travailler pour le développement de la nation ? Je vous aime toutes et tous et espère vous retrouver dans les salles de sport de la capitale. A très bientôt, inch’Allah ! ».

Le message est très limpide ! Il n’est pas normal qu’un pays aussi vaste et très jeune comme le Tchad soit absent lors de différentes compétions sportives sous régionales et continentales. L’État tchadien doit investir dans le sport car la santé physique et mentale de sa jeunesse en dépend. Vivement à la deuxième « musculation » nationale, s’il plaît à Dieu !

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